« Dis-moi dix mots à tous les temps ! »
En remplacement du
devoir du lundi, Adrienne a eu la gentillesse de relayer "la proposition de
Lalie sur son devoir d’hier" ; il s’agit d’une "Toile de Carl NYS (Belge, né en 1858) dont le Titre
est : "Dans le hall d’entrée".
Pour suivre les liens
de nos amies :
- Adrienne : https://adrienne414873722.wordpress.com/2023/03/06/e-comme-egidia/comment-page-1/#comment-102438
- Lalie : https://lalitoutsimplement.com/en-vos-mots-827/
Consignes : notre
texte devra comporter l’un ou l’autre des 10 mots de la Langue Française 2023, plaçant
en premier : « tic-tac » ; les neuf autres mots sont :
année-lumière, avant-jour, dare-dare, déjà-vu, hivernage, lambiner,
plus-que-parfait, rythmer, synchrone…
Commencer le texte par
:
- « Le tic-tac des horloges, on dirait des souris qui
grignotent le temps.¹
» [Citation de M.
Alphonse Allais, Le Chat noir, 1890] ;
- Le terminer par :
«
A-t-on déjà vu quelqu'un embrasser l'instant qui passe ? ²
[citation de François Poirié].
Émoi au
secret d’une loge
« Le tic-tac des
horloges, on dirait des souris qui grignotent le temps ¹
» me souffle monsieur le comte Hubert de Touvarie, ne tardez point, jeune
demoiselle, vous êtes déjà en retard. »
Le
tic-tac de la pendule m’insuffle de me presser. Son "tic-tac"
répétitif "rythme, synchrone" avec les battements de mon cœur… tictac,
tictac, Ô combien j’ai le trac ! Je "lambine" dans l’atmosphère précieuse
de cet exquis manoir où j’officie depuis trois mois, comme secrétaire particulière de monsieur le comte, un soixantenaire
veuf charmant. Il
se confie à moi, n’a pas d’enfants mais un neveu sur lequel il s’extasie
régulièrement.
Monsieur
de Touvarie me montre l’ouvrage qu’il a déposé sur la table Louis XVI à mon
intention, me conseillant de lire le roman de « l’Abbé Prévost, Manon Lescaut ».
Aujourd’hui,
je ne travaille pas.
Monsieur le comte m’avait demandé de l’accompagner à une pièce de théâtre. Au
dernier moment, il a prétexté un malaise et souhaité que je m’y rende seule. Je
poursuis ma causette auprès de cet homme érudit qui aime la musique, la peinture
et la littérature. Il excelle au piano, au violon. Il peint des toiles, me les
soumettant avec bonheur.
Pour
cette sortie, j’ai mis une robe de soirée -orangée à volants- soulignant mon
corps gracile. Monsieur le comte m’a tendu une ombrelle blanche précisant qu’elle
appartenait à sa défunte épouse, ainsi qu’une lorgnette.
— Tous
les regards seront tournés vers vous, tant vous êtes ravissante ma chère enfant.
Vous me rappelez une amie actrice : même regard, même distinction, même
finesse ! Il y aura grande affluence ce soir ! et vous êtes attendue,
ajoute-t-il.
— Attendue, répliqué-je,
étonnée ?
— Une
loge particulière est prévue. Tenez, ajoutez ce camélia rouge sur votre
corsage, il soulignera la perfection de vos lèvres rouge cerise, il s’assortit
bien à votre chapeau.
On
frappe, le cocher de monsieur le comte me conduira au Grand Théâtre où l’on
joue une pièce inspirée d’un roman d'Alexandre Dumas.
La Berline
1870 m’a déposée devant l’opéra. La proximité de ce lieu mondain m’intimide. On
m’a remis le programme de « La Dame aux camélias » puis accompagnée
dans une loge privée. Un couple est déjà assis, nous nous saluons. Je m’assieds
sur l’un des fauteuils disponibles.
Je
sens une présence derrière moi…
je me retourne, un grand jeune homme brun, élégant, raffiné, se présente :
— Bonjour,
je suis Arthur de Touvarie, enchanté de vous connaître ! mon oncle m’a beaucoup
parlé de vous. J’éprouvais le vif désir de vous rencontrer.
— Bonjour monsieur ! Sarah, enchantée !
— Ravie de vous
rencontrer. Vous portez le même prénom que Sarah Bernhardt, l'étoile de ce
soir ! Sa beauté n’a d’égale que la vôtre !
Confuse,
je balbutie :
— Je vous en prie, ne vous moquez pas…
— Je
remarque que vous portez un camélia rouge ; permettez-moi de vous offrir ce
bouquet de camélias blancs !
Sans
attendre de réponse, il se penche au balcon, des spectateurs se lèvent et
l’applaudissent chaleureusement.
Le
couple assis se lève à son tour, le congratulant vivement. Arthur se tourne
vers moi en souriant :
— Pardonnez
mon outrecuidance, Sarah ! je suis le metteur en scène de cette pièce mais
aussi comédien. Vous m’honorez de votre présence. Mon oncle m’a dit tant de
bien de vous qu’il me fallait rencontrer la Divine Sarah. Désolé, la scène m’appelle.
Marguerite m’attend en coulisse. À ce soir, après la représentation. Rejoignez-moi
dans ma loge...
Trois
coups retentissent. Les artistes entrent sur scène. Arthur m’adresse un
signe amical appuyé. Je rougis lorsque les regards se tournent vers moi.
Je suis
touchée par la performance des acteurs et des dialogues "plus que parfaits"
évoluant au fil des actes… Je m’identifie à « sa Manon adorée » dont je
remarque la splendeur ; je suis littéralement bercée par sa « voix d’or ». « Je n’ai d’yeux que
pour lui qui n’a d’yeux que pour elle ! »
…Me voici
courtisane, amoureuse, effleurant Armand Duval. Je songe agréablement que
nous quittons le théâtre à "l’avant-jour" d’une passion
naissante, après une nuit fiévreuse, moi la seule Sarah offerte à ses bras…
à des années-lumière d’ici !
Scène
finale. Rideau. Les acteurs nous saluent. Crépitements des hourras, bravos !
L’assemblée se lève, acclamations ! Je me penche au balcon, Arthur lève
les yeux vers moi. Son regard me déshabille...
Troublée,
le cœur en émoi… tictac, tictac… Je n’ai aucune chance ! Je renonce et
quitte précipitamment l’opéra ! Dans la voiture hippomobile qui me
ramène, j'entends les flip-flap, flip-flap… des sabots des chevaux marchant au
pas, ils claquent languissamment tandis que je serre contre moi le bouquet de camélias
blancs... hommage d’une rencontre fugitive.
« A-t-on
déjà vu quelqu'un embrasser l'instant qui passe ? ² »
💙💚💛💜
elle aura eu son instant de rêve, un conte avec un comte :-)
RépondreSupprimerCoucou, merci Adrienne, j'aurais bien aimé tenir le rôle d'une étoile d'un soir ou bien davantage !
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