Proposition de M. le Goût des Autres : Mais à quoi diable pensait Mark Keller en peignant cette jeune femme ? Il me vient plein d’idées à regarder cette toile. Mais à vous ? Je me dis que ça devrait commencer par : « Ma tante a dit : t’as perdu ta langue, Anne ? » Et finir sur : « Et elle se trouve renvoyée à la solitude. »
En relisant cette citation d’Annie Ernaux, comme elle je m’interroge, oh, pas sur ma vie mais sur le titre du livre car « ce qu’ils disent ou rien » me ramène au langage silencieux de la contemplation, face à l’une des œuvres de Mark Keller !
J’ai perdu ma langue… et soudain :
L’obscurité coule sur elle. Des ombres tressaillent dans les arbres, telles des formes lugubres se jetant sur elle. À cette heure tardive -d’habitude- on voit s’arrêter des couples d’amoureux discrets ou d’autres qui viennent "s’égrillarder" et s’en griller une en tenant des propos libidineux.
La belle enfant est maintenant concentrée. Les phares sont restés allumés, éclairant la pénombre, projetant une clarté transparaissant entre ses jambes hautes et minces. L’endroit s’emplit de l’aura émanant d’elle.
La belle demoiselle répète sans cesse :
Comment une aussi belle personne peut-elle vouloir perdre sa langue... ? Elle franchit la ligne d’ellébores fétides qui pullulent ici comme du chiendent, je les fuis comme la peste ! Je remarque ses talons embourbés dans une langue de terre. Elle serait mieux dans une salle de bal.
Elle se retourne, lève la tête... m’aurait-elle vu ? Son visage est baigné de larmes maintenant. Elle scrute la pénombre puis la voici qui s’active avec la pelle ! je comprends mieux : elle enlève précautionneusement plusieurs racines de « roses de Noël » ; monte alors une étrange odeur de sucs que je reconnais : « Cette plante est toxique ». Le sait-elle ? que veut-elle en faire ?
Elle gémit :
C’est alors qu’elle me voit. Je fais un saut en arrière mais elle me rassure :
N’écoutant que mon cœur, j’ai écarté toute racine de sa vue… je ne voyais plus que la belle demoiselle. Dans un soupir, j’ai murmuré ces vers :
La voiture s’éloigne maintenant, la jeune femme pleure autant. Dans l’habitacle, si vous étiez là, vous entendriez : — Oui, tatie, oui ma tatie ! j’attendais un signe du Ciel pour renoncer à notre projet… et voici que ce bel oiseau noir a surgi pour picorer ma cueillette !
Elle ne vit pas, n’entendit pas le petit "corbiau" sur l’arbre perché, croassant des toc-toc-toc et kra-kra-kra… désespérés ; une larme coulait sur son bec ; il contemplait son grand frère -allongé sur le sol- qui ne se réveillait pas.
La belle dame reviendrait-elle demain ? …avant qu’elle ne se trouve renvoyée à la solitude…
elle a bien choisi sa tenue pour herboriser :-)
RépondreSupprimerbonne idée, le point de vue du corbeau!
coucou Adrienne, ce qui est merveilleux, c'est que nous contemplons tous la même toile et que, tout en employant les mêmes mots, consignes... chacun(e) nous offre son Histoire ! Merci à toi !
RépondreSupprimerTraitement très original de la consigne ! J'ai bien aimé.
RépondreSupprimerEt belle idée de citer Edgar Poe qui convient bien à l'atmosphère du texte.
« Et les bords » de la mort ne sont pas loin… (oui je sais le jeu de mots est foireux…)
Coucou Alain, merci beaucoup ; je viens de visiter le vôtre, bravo ! Citer la mort n'est pas loin de sa nouvelle "Le Masque de la Mort Rouge" à relire ... cela me ramène aussi à Baudelaire ... mais ce soir pas de spleen, juste le plaisir d'avoir lu les un(e)s, les autres... Bonne soirée, à bientôt !
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